Louis_greniier a écrit:Eric GARF a écrit: pour la tour dans ce cas précis d'avoir déclaré ou non une urgence ?
Drapo va surement nous le dire. Mais ce que j'ai lu sur les avantages pour le contrôleur, c'est que ça lui permets de sortir de son cadre d'opération pour permettre n'importe quoi qu'il juge utile pour la survie des gens et de minimiser l'impact sur les autres trafics. Ca lui permets, comme au pilote d'ailleurs, de sortir du cadre prévu.
Car leur cadre est assez rigide. Sans urgence, ils se doivent de le suivre. Dans ton cas, si ça s'était mal terminé, les contrôleurs auraient pu, pas exemple, être blâmé pour t'avoir autoriser à virer de bord sur une route non prévue, ou sur une route ou il y avait un trafic IFR pour Mirabel alors que tu ne transmettais plus ton mode C. Enfin, au moins une douzaine d'affaire leur auraient tombé dessus suite à l'enquête. C'est certain que ça aurait fini par être le pilote le responsable, mais les contrôleurs auraient eu à se justifier d'être sorti de leur cadre alors que rien ne les autorisait puisque tu n'avais pas déclaré une urgence.
Un exemple douloureux. Le vol de Propair dont un feu au moteur avait été déclaré par des voyants dans le dash. Le pilote, malgré la perche maintes fois tendues par le contrôleur , ne voulait pas déclarer d'urgence. Le contrôleur voulait le faire atterrir à Mirabel en priorité. Mais il n'avait pas vraiment la latitude pour le faire si le pilote ne déclarait pas une urgence, puisque le contrôleur doit l'amener 10 milles alignée en finale. Le contrôleur, si le pilote avait déclaré une urgence, aurait dévier Air France qui s'en venait, et aurait dirigé l'avion avec une finale de 5 milles. Le pilote a maintes fois refusé de déclarer l'urgence. Le contrôleur a été obligé de l'envoyer dix mille en finale.
Le feu en a profité pour faire des dommages structuraux à l'aile. Avec les délais additionnels, l'avion a perdu son aile juste avant d'arriver à la piste. Entre la 15 et le seuil de piste. Tout le monde est mort.
Dans ton cas, du temps a du être perdu par les contrôleurs à se demander si ils étaient obligés, ou pas, à sécuriser le chemin prévu pour ta destination et ton dégagement du plan de vol original. Alors qu'ils savaient bien que tu n'y était pas. Mais comme tu n'as pas déclarer d'urgence, ils se doivent de présumer que ton plan de vol est valide et possible d'être repris en aveugle. L'espacement sur cette route avec les autres traffics doit être gérer différemment avec une panne de com , et de transporteur. Du temps de perdu pour eux et pour ces trafics qui ne se retrouvent même pas ou tu es. Avec une déclaration d'urgence, tu donnes aux contrôleurs plein pouvoir de t'aider avec le minimum de perte de temps à gérer à l'intérieur du carcan des procédures obligatoires pour lui.
Enfin, on verra ce que Drapo en dit.
Louis
Désolé pour le délai, j'étais absent pour quelques jours!
Louis a très bien expliqué les raisons pour lesquelles on devrait déclarer une urgence si on anticipe avoir besoin d'une aide extraordinaire lors d'une situation particulière. Sa référence à l'accident de Mirabel, il y a quelques années, touche un point sensible car j'étais présent et nous avions été marqués par le fait qu'il ne manquait que quelques secondes pour que l'événement ait une meilleure conclusion.
Mais il y a aussi d'autres histoires qui se sont mieux terminées. Je pense entre autres à ce jeune pilote des Maritimes qui faisait un vol vers Fredericton et qui s'est retrouvé à 9000' au-dessus d'une couche nuageuse solide dans le coin de Tremblant, alors qu'il lui restait +/- 30 minutes de carburant. Les premières questions dans ces cas-là sont pour savoir si le pilote et/ou l'avion sont qualifiés IFR. Comme il avait répondu négativement aux deux, je lui avais dit que je pouvais l'aider mais qu'il devait déclarer une urgence, car la procédure utilisée n'était pas usuelle. Dès qu'il a confirmé l'urgence, j'ai vérifié s'il avait des heures de pratique IFR et s'il se sentait confiant de maintenir le vol rectiligne dans les nuages, car avec les rapports que je recevais des pilotes IFR aux alentours, la couche était continue jusqu'autour de 800'. À partir de là, je l'ai amené une trentain de milles en finale la piste 24 à Mirabel, qui est au-dessus de champs pour la plupart du trajet, et un coup bien établi sur un cap corrigé pour le vent, je lui ai dit d'amorcer une descente dans les nuages à un taux constant de 500fpm. À partir de là, je n'avais plus grand rôle à jouer que de le rassurer et/ou de lui tenir compagnie en lui parlant et communiquant sa distance et son écart par rapport à la pente idéale et au cap. Autour de 6500', il était entre deux couches, nous en avons profité pour revoir le cap d'une dizaine de degrés et il a poursuivi sa descente pour +/- 6000' dans les nuages pour enfin briser la couche à 1/2 nm finale et 800', aligné avec le seuil de piste. C'était une solution extrême que je n'aurais pu mettre en place si le pilote n'avait pas déclaré d'urgence. Je ne me rappelle pas si le pilote avait volontairement rempli ou si on lui avait demandé un rapport, je n'ai jamais vu de tel écrit, mais je ne crois pas que ça devrait jouer dans le fait de déclarer ou non une urgence.
En plus de permettre au contrôleur d'utiliser TOUTES les ressources pour vous aider à vous sortir d'une situation limite, en déclarant une urgence, vous justifiez tout écart à une procédure ou un règlement que vous pourriez briser en vous sortant du pétrin et ça vous donne une circonstance atténuante si jamais il y a une audition à ce sujet. Je ne dis pas que vous allez vous en tirer, mais ça risque de peser dans la balance.